Non à la militarisation de la paroisse de Palo Quemado (Équateur) pour faire avancer un projet minier canadien

Manifestation contre le décret 754 à Sigchos, Cotopaxi, Équateur. Crédit photo : Confédération des nationalités indigènes de l'Équateur (CONAIE).

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Lettre ouverte à la société minière Atico, au président de l’Équateur et au gouvernement canadien

Nous, organisations de la société civile équatorienne, canadienne et internationale soussignées, souhaitons exprimer notre profonde inquiétude face à la militarisation, la criminalisation et l’intimidation des communautés campesino, montubio et indigènes de Palo Quemado (Sigchos, Cotopaxi), affectées par la compagnie minière canadienne Atico Mining et son projet La Plata, en raison de leur défense de l’eau et de la vie.

Atico Mining tente de faire avancer le projet minier « La Plata » (or, cuivre, zinc et argent) dans la province de Cotopaxi, au nord-est de l’Équateur. Une grande partie des communautés locales de Palo Quemado et de Las Pampas s’opposent fermement à l’exploitation minière depuis au moins 40 ans, au motif que les activités minières ont déjà entraîné la contamination de leurs bassins hydrographiques et de leurs sols. Ils craignent que de nouvelles activités minières ne menacent l’intégrité des écosystèmes environnants, la qualité de l’air et de l’eau, et ne nuisent au tissu social de leurs communautés. Ils craignent que leurs moyens de subsistance, à savoir l’élevage de bétail et la culture de la canne à sucre (panela) destinée à l’exportation vers l’Europe, ne soient affectés.

Le 28 octobre 2024, la paroisse de Palo Quemado a été militarisée, sur décision du président Daniel Noboa, afin de conclure un processus de consultation environnementale qui permettra au projet minier de La Plata – appartenant à la société minière canadienne Atico Mining – de passer à l’étape de l’exploitation.

Toutefois, ce n’est pas la première fois que les forces de sécurité de l’État sont utilisées pour soutenir Atico Mining et intimider les communautés de Palo Quemado.

La Plata est l’un des deux sites d’essai du nouveau processus controversé de consultation environnementale de l’Équateur – un processus qui, de par sa conception, ne garantit pas que toutes les communautés à risque soient correctement informées et consultées. Il n’accorde pas aux communautés le droit d’opposer leur veto aux projets de développement sur leurs terres et a été rejeté à plusieurs reprises en raison de son inconstitutionnalité. Après une première tentative infructueuse en 2023, le gouvernement national a repris une consultation en mars 2024 dans la communauté de Palo Quemado. En réponse aux manifestations pacifiques, une importante répression militaire et policière a eu lieu, faisant au moins 15 blessés, une personne dans le coma et plus de 70 défenseurs et défenseuses de l’environnement accusé.es de terrorisme, de crime organisé et d’association de malfaiteurs dans le but de criminaliser leur droit légitime à manifester. Bien que la consultation ait été suspendue en mars, les tribunaux sont revenus sur cette décision. Depuis lors, les craintes sont grandes de voir se renouveler les efforts pour mener à bien la consultation et, par là même, la violence de l’État. La présence militaire massive à Palo Quemado entre les 27 et 28 octobre prouve que ces craintes sont fondées et représente une menace imminente pour le territoire.

Outre la criminalisation, les défenseurs et défenseuses de l’environnement de Palo Quemado et Las Pampas ont également subi des actes de harcèlement et d’intimidation, notamment un assaut de harcèlement sur les médias sociaux en réponse à leur travail de sensibilisation à la protection de la terre et de l’eau à la lumière des menaces posées par le projet La Plata. L’entreprise canadienne a été accusée de mettre en œuvre une stratégie de surveillance et de contrôle en installant des caméras près du centre-ville sous prétexte de renforcer la sécurité, créant ainsi une atmosphère de peur et de tension dans les communautés.

Plusieurs agences des Nations Unies, telles que le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme Volker Türk et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des défenseurs des droits de l’homme Mary Lawlor, ainsi que des organisations internationales de défense des droits de l’homme telles qu’Amnesty International, ont dénoncé ce processus de consultation environnementale et la violence dans laquelle il s’est déroulé.

Le Haut Commissaire Türk a déclaré à l’époque : « Les personnes directement affectées par des projets ou des activités minières doivent être entendues et non réprimées. »

Le Canada ne s’est pas prononcé en faveur des défenseurs et défenseuses des droits et des communautés touchées et n’a pas dénoncé les violences commises à leur encontre ; au contraire, il a remis en question les rapports des organes de l’ONU.

Le recours aux forces de sécurité de l’État pour réprimer l’opposition locale à l’exploitation minière est une tendance croissante en Équateur. Selon un accord entre les ministères des ressources non renouvelables et de la défense nationale de l’Équateur, 14 projets miniers ont été désignés comme « zones de sécurité » (Áreas Reservadas de Seguridad), y compris La Plata et cinq autres projets miniers canadiens. L’accord de libre-échange actuellement négocié entre le Canada et l’Équateur vise à accroître les investissements miniers dans le pays et à accorder aux entreprises minières des privilèges encore plus importants. Cet accord commercial ne fera qu’accroître la répression et déclenchera de nouveaux conflits socio-environnementaux.

La population équatorienne, et en particulier les communautés touchées par les projets miniers canadiens, n’est pas informée de l’avancement des négociations. L’Équateur n’a pas non plus évalué l’impact de l’accord commercial proposé sur les droits de l’homme et l’environnement. Comme l’ont exprimé quatre défenseurs de l’environnement, autochtones et paysans de l’Équateur participant à une délégation au Canada et plus de 100 organisations de la société civile équatorienne, un accord de libre-échange entre les deux pays entraînera encore plus de dévastation dans les territoires et de violations des droits de l’homme et de la nature.

Nous, organisations de la société civile et représentants de mouvements sociaux, soutenons cette lettre et rejetons la militarisation, l’intimidation et la criminalisation des défenseurs de l’environnement à Palo Quemado. Nous sommes solidaires avec eux. Nous demandons à Atico Mining et aux gouvernements équatorien et canadien de :

À Atico Mining :

  • Cesser de criminaliser et d’intimider les communautés affectées, y compris les communautés Montubio, campesino, indigènes et riveraines de Palo Quemado qui défendent l’eau, les droits des communautés et la nature.
  • Cesser ses activités et se retirer de Palo Quemado.

Au pouvoir exécutif équatorien :

  • Annuler le processus de consultation environnementale pour la concession minière de La Plata.
  • Annuler l’accord entre les ministères des ressources non renouvelables et de la défense nationale pour l’établissement de « zones de sécurité » (Áreas Reservadas de Seguridad) autour de 14 projets miniers, dont celui de La Plata.
  • Cesser les négociations d’un accord de libre-échange avec le Canada.

À l’ambassade du Canada en Équateur :

  • Mettre en œuvre le document « Voix à risque : Lignes directrices du Canada pour le soutien des défenseurs des droits de la personne » et dénoncer publiquement l’intimidation et la criminalisation des communautés par l’entreprise canadienne Atico Mining.
  • Retirer tout soutien commercial, diplomatique, politique et économique à Atico Mining.
  • Conformément à la politique étrangère féministe du Canada, nous vous demandons instamment d’émettre une déclaration publique officielle sur les médias sociaux en soutien à toutes les femmes défenseurs de l’environnement qui sont attaquées pour avoir défendu leur territoire et leur vie.

Au ministre canadien du commerce international, de la promotion des exportations, des petites entreprises et du développement économique, Mary NG :

Cessez de négocier un accord de libre-échange avec l’Équateur.

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