La crise climatique est une crise d’envergure mondiale: elle représente les conséquences désastreuses du système capitaliste mondial de l’humanité. Les températures élevées, les phénomènes météorologiques imprévisibles, les inondations, les feux de forêt et les émissions de gaz à effet de serre menacent l’avenir du monde naturel.
Cet enjeu a déjà fait l’objet de recherches et d’analyses considérables de la part de journalistes et de scientifiques environnementaux. Ceux-ci ont fourni des solutions qui permettraient à tous les pays de réduire leur empreinte carbone et de se tourner vers des moyens de production alternatifs. Toutefois, il est important de souligner que celles et ceux qui vivent dans le Sud global, qui sont les plus vulnérables face aux désastres environnementaux, ne sont guère en mesure de mitiger ces conditions difficiles ou de s’adapter à un “mode de vie écologique,” puisque plusieurs doivent faire ce qu’iels peuvent afin de survivre. Au Kenya et au Soudan, par exemple, la crise climatique a empiré les conditions de vie au sein des sociétés agricoles.
Plus particulièrement, les fermières kényanes et soudanaises sont l’un des groupes les plus sévèrement affectés par les changements climatiques – et aussi l’un des plus résilients, malgré le fait qu’elles n’ont pas contribué à la création de la crise.
La Banque mondiale estime qu’entre 70 et 80% des fermiers kényans travaillent dans des “fermes de subsistance à petite échelle” (Allen et al.). Toutefois, cette répartition est très genrée: les fermières représentent “75% de la main-d’œuvre au sein de l’agriculture à petite échelle” (Fenn). L’inégalité de genre dans l’agriculture à petite échelle est donc très étendue. Souvent, les fermières sont responsables de tout le travail du ménage, que ce soit labourer les champs pour fournir une source de revenu à la famille, préparer les repas, ou exécuter d’autres tâches ménagères. Alors que l’environnement devient de plus en plus imprévisible, les fermières kényanes font face aux risques ajoutés de perdre leurs terres fertiles et de faire face à de l’insécurité alimentaire.
Au Kenya, le climat est souvent caractérisé comme étant aride ou semi-aride avec des “sécheresses prolongées” qui menacent la sécurité alimentaire de ménages qui dépendent de l’agriculture (UN Women). Une fermière du comté de Laikipia, Julia Nyambura, raconte que des sécheresses sévères assécheraient entièrement ses cultures de maïs et de haricots. De nouvelles pratiques agricoles sont en train d’être introduites afin de combattre les effets des phénomènes météorologiques imprévisibles, y compris l’hydroponie, des jardins verticaux, et l’installation de systèmes de collecte des eaux. Cependant, la durabilité de ces pratiques requiert un renforcement des compétences adéquat ainsi que l’aide à court terme d’organismes locaux et internationaux.
Le climat dans le pays est-africain voisin du Kenya, le Soudan, est très semblable. Tout comme le Kenya, le Soudan est enclin à souffrir de longues sécheresses et a un climat aride ou semi-aride et imprévisible, ce qui limite la capacité des fermiers à faire pousser leurs cultures de façon fiable et régulière (PNUE). Comme le Soudan dispose de structures sociales traditionnelles semblables à celles du Kenya, les fermières, là aussi, font face aux effets du climat changeant de façon disproportionnée, puisqu’elles forment la majorité des fermier·ère·s de subsistance. Les fermières sont souvent exclues de l’accès aux ressources telles que des engrais ou des pesticides qui peuvent “augmenter la productivité et améliorer les modes de vie” (ZWD).
Selon un organisme soudanais militant pour les droits des femmes, Zenab for Women Development (ZWD), l’un des plus gros problèmes auquel font face les fermières est la dégradation du sol soudanais. Les effets de l’érosion des sols augmentent de façon significative les risques de “la consommation de l’eau, des maladies véhiculées par l’eau” et ceux d’inondation (ZWD). Afin de mitiger ces effets désastreux des changements climatiques, des organismes internationaux tels que le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et ZWD ont contribué à des initiatives de renforcement des capacités qui visent à consolider le savoir et les compétences des fermières soudanaises, en raison de leur vulnérabilité face au climat imprévisible.
L’une des approches les plus efficaces du projet Wadi El Ku à Darfur, au Soudan, est la protection face aux inondations par la conservation de l’eau. Le but de ce projet était d’équiper des fermières, dont plusieurs ont souffert de grandes pertes affectives lors du conflit politique, de savoirs techniques afin qu’elles puissent conserver de l’eau de pluie pour récolter, entreposer et vendre leurs cultures de façon efficace (PNUE). Ce projet a entraîné de plus grandes opportunités économiques pour les fermières: non seulement a-t-il fourni des compétences, il a également réduit le risque d’inondation, ce qui est l’un des effets les plus dévastateurs des changements climatiques pour les fermières et fermiers à Darfur.
Les changements climatiques affectent les groupes vulnérables dans des pays du Sud de façon très différente qu’ils affectent celles et ceux qui habitent un pays du Nord. Celles et ceux qui pratiquent des méthodes d’agriculture traditionnelles sont obligés de dépendre de conditions météorologiques propices, sans quoi leurs moyens de subsistance sont à risque. La productivité agricole des fermières au Kenya et au Soudan est essentielle: non seulement fournissent-elles des aliments à leurs ménages individuels, elles contribuent aussi à réduire le niveau d’insécurité alimentaire dans leurs pays respectifs.
Il est crucial de soutenir des initiatives écologiques développées et mises en place au Kenya et au Soudan, mais il ne faut pas oublier qu’à la longue, cette crise ne pourra pas être résolue en encourageant des groupes vulnérables à adopter des méthodes alternatives, mais devra être affrontée en encourageant les gens du monde entier à faire pression sur leurs gouvernements et sur les grandes compagnies afin que celles-ci agissent.